DRUMMONDVILLE. Alertés par la mousse qui flottait à la surface du ruisseau Paul-Boisvert, des citoyens ont entrepris de faire analyser la qualité de l’eau. Résultat : le taux de phosphore dépasse 33 fois la norme.
Un résident du boulevard Allard, Michel Fontaine, affirme voir apparaître des amas de mousse blanche de façon sporadique dans ce cours d’eau, soit environ une fois ou deux par mois. "Durant les grands congés, il y en a plus", résume-t-il.
Le 31 août dernier, la situation était telle qu’il a contacté une connaissance, Serge Girard, qui a fait des prélèvements d’eau, avec des pots maçons stérilisés, pour des fins d’analyse. "L’eau était comme grise", se souvient M. Girard.
Ce même jour, un autre environnementaliste, Camille Desmarais, a fait le tour du bassin pour tenter d’identifier les causes de cette mousse. Il a porté son attention sur l’activité agricole, souvent accusée de polluer les sources d’eau. Son constat : il n’y avait pas d’épandage et peu de ruissellement a été observé. "Cela signifie qu’il y a moins de pollution liée à l’érosion. Les particules restent dans les champs", précise-t-il.
Grave dégradation
Pourtant, les résultats d’analyse communiqués à L’Express provenant, disent-ils, d’un laboratoire professionnel révèlent un taux extrêmement élevé de phosphore, variant de 0,90 mg/L à 1,01 mg/L, alors que la valeur critique se situe à 0,03 mg/L.
"C’est anormal", s’exclame M. Desmarais, qui a également remarqué la présence de cette mousse sur les eaux de la rivière Saint-François, dans laquelle se jette le fameux ruisseau. "Le phosphore, c’est comme du savon. Ça fait de la mousse quand l’eau est brassée", illustre-t-il.
"C’est inquiétant! Il faut se questionner, d’autant plus que la prise d’eau est en aval", renchérit M. Girard, faisant référence à l’usine de traitement des eaux.
En guise de solutions, ces derniers prônent entre autres un meilleur contrôle du ruissellement en milieu urbain, que ce soit par le débranchement des gouttières, l’implantation de jardins de pluie ou l’ajout de tranchées filtrantes.
Des causes pointées du doigt
En plus de l’agriculture, d’autres causes peuvent, selon eux, contribuer à ces résultats préoccupants : l’urbanisation et le site d’enfouissement (incluant les installations de production d’électricité et les serres Demers).
Il faut savoir qu’avant 2007, le lixiviat, qui était décontaminé en partie au site d’enfouissement, était rejeté dans le ruisseau Paul-Boisvert. Son état se serait amélioré par la suite, si l’on se fie au Groupe d’aide à la recherche et à l’aménagement de la faune (GARAF), qui est intervenu régulièrement pour améliorer ce cours d’eau.
Malgré les efforts, les pages de L’Express faisaient état, en juin 2008, du taux de phosphore trop élevé dans ce ruisseau (0,23 mg/L). Pourtant, il n’avait rien à voir avec celui d’aujourd’hui!
À l’époque, le Garaf soulevait une autre cause potentielle, soit les fosses septiques non conformes.
Les algues aussi de la partie
En plus de la mousse, Michel Fontaine voit aussi des algues vertes s’implanter dans le ruisseau Paul-Boisvert, ce qui n’était pas le cas auparavant.
Ces résidents drummondvillois se demandent si le phosphore contribue à l’accumulation d’algues remarquée dans des secteurs de la rivière Saint-François où le courant est plus faible.
Ils sont encore moins rassurés depuis l’avertissement, il y a quelques semaines, voulant que l’eau du réseau d’aqueduc de Drummondville présentait une odeur et un "goût de terre", causés par la présence de géosmine et du méthylisobornéol.
Selon M. Desmarais, ces produits se retrouvent dans les eaux de surface des cyanobactéries (algues bleues).